J'inspire, je demeure dans le moment présent
J'expire, je sais que c'est un moment merveilleux

Cinquième message de la Retraite d'Hiver Chez Soi


La méditation n’est pas une évasion, c’est une rencontre sereine avec la réalité -Thich Nhat Hanh


Les six Paramita, chemin de l’amour véritable


Cinquième message de la retraite d’hiver 2014/2015 : Dhyana Paramita

 

 Hyana Paramita : la perfection de la Méditation.

La méditation bouddhiste comporte deux aspects – shamatha et vipashyana. Nous avons tendance à souligner l’importance de vipashyana – le « regard profond » qui nous apporte la vision profonde et nous libère des souffrances et des afflictions. Mais la pratique de « shamatha » (l’arrêt) est fondamentale. Si l’on ne s’arrête pas, la vision profonde ne sera pas possible.

(Le Cœur des Enseignements du Bouddha – TNH)

Nos énergies d’habitude sont comme ce cheval emballé au galop qui emporte son cavalier à toute vitesse ; le cavalier ne peut plus rien faire pour arrêter le cheval et il ne sait pas jusqu’où il va aller ainsi, mais peut-être le cheval, dans sa panique et sa fureur, connaît-il le chemin à suivre ? Cette image d’un conte zen reflète notre état lorsque nous sommes emportés par nos pensées, notre oubli, nos émotions fortes qui finalement mènent notre vie à leur guise, et bien que nous ayons la volonté d’être en paix ou d’apporter la paix à nos familles, à nos parents ou à nos amis, nous agissons toujours selon ces énergies d’habitude qui génèrent la colère, la tristesse, la peur…

Nous avons besoin de la pleine conscience de notre corps, de notre respiration, de notre mental, pour mettre un terme à cette course effrénée, pour nous donner un peu de calme et être capable de sourire.

Propositions d'exercices.

1) Lire le chapitre 6 dans « le Cœur des Enseignements du Bouddha » (page 38)

« L’arrêt, le calme, le repos et la guérison »

2) Petits exercices sur l’arrêt à faire chez soi ou au travail :

A la maison : - si nous avons une petite cloche, nous pouvons l’inviter à nous ramener à notre respiration de temps en temps, en faisant trois inspirations et expirations, très légèrement, en suivant bien le mouvement de l’air qui entre et sort de nos poumons. (Nous pouvons utiliser aussi le téléphone ou n’importe quel évènement sonore).

    Pendant l’arrêt de notre activité physique ou mentale pour effectuer trois respirations, nous pouvons laisser venir un demi-sourire sur nos lèvres qui nous apportera du calme et du repos.
    Ou bien, profiter aussi d’une nouvelle fleur ou d’une nouvelle pousse toute verte, toute fraîche, de notre plante d’appartement, pour nous ramener à notre pleine conscience.

Au travail : - nous pouvons pratiquer l’arrêt en allant aux toilettes, en prenant le temps d’inspirer et d’expirer tranquillement pendant le trajet de son bureau jusqu’aux toilettes.

    En se lavant les mains aux lavabos, lentement ouvrir le robinet et faire couler l’eau afin d’apprécier vraiment l’eau fraîche sur nos mains ; nos mains sont précieuses, l’eau aussi est précieuse pour notre vie.
    En allant boire un café avec un collègue, même si physiquement nous ne pouvons peut-être pas nous arrêter, nous pouvons garder présente notre attention à la respiration, surtout en buvant le café : - j’inspire, je sais que je bois un café, j’expire, je sais qu’il y a un nuage dans mon café…

3) Savourer le bonheur de la pratique :

Pratiquer l’arrêt c’est pratiquer l’arrêt de nos énergies d’habitude, de colère par exemple :

    Lorsque notre bien-aimé(e) rentre du travail avec beaucoup d’énergie négative telle que la colère ou l’énervement, lui donner simplement le temps d’arriver chez lui ou chez elle, lui donner le temps de pratiquer l’arrêt, le temps de la parole, et peut-être lui préparer une boisson chaude afin de s’assoir ensemble et observer ainsi un silence bienfaisant, au lieu de réagir trop rapidement et trop brutalement à une énergie négative. Pour cela, il faut soi-même être capable d’être vraiment là : « Chérie(e), je sais que tu es rentré(e) et j’en suis très heureux (heureuse). »


4) Le calme et le repos :

Si nous habitons tout seul, ou en famille, nous pouvons pratiquer le calme et le repos en rentrant de notre travail, et cela commence déjà dans les transports ou dans notre voiture : - si ma voiture va vite, je sais que je vais vite, et si tout est ralenti, voire à l’arrêt dans les bouchons, quelle joie de respirer sereinement ; - quand je prends les transports, nous sommes des milliers à le faire en même temps, telle une rivière humaine… joyeuse interdépendance.

En arrivant à la maison, après s’être rafraîchi, s’assoir quelques minutes en silence ou s’allonger à même le sol sur le dos, tel un chat qui se détend de tout son corps, et se laisser « couler » comme un caillou ou un galet jusqu’au fond de la rivière, sur le banc de sable.






5) Concluons par une méditation

- Lorsque je ressens la colère, qu’elle soit soudaine ou qu’elle grandisse par étapes entraînant des manifestations telles que palpitations, rougeurs, crispations, tremblements, etc.., je prends conscience de ma respiration, de mon corps, puis j’essaye de reconnaître cette colère pour ce qu’elle est : « Bonjour ma petite colère, je sais que tu es là », en essayant de ne pas réagir à vif à cette situation difficile, en acceptant le fait que je sois vraiment en colère.

- Pratiquer la marche méditative en inspirant et expirant à la fois profondément et légèrement, permet d’embrasser la colère en soi, tout comme on prend un bébé dans ses bras pour le calmer quand il souffre. Le fait de pratiquer la respiration consciente apporte calme et douceur, cela permet « d’embrasser » un sentiment douloureux.

- Puis, je regarde en profondeur d’où vient ce sentiment, afin de voir et comprendre, le ou les évènements qui sont la cause de ma colère pour mettre à jour clairement son origine, ses racines, et apprendre ainsi comment ne pas arroser à nouveau cette graine de colère.

(Il est conseillé de pratiquer la marche méditative, plutôt que de réagir à vif à une situation difficile).




Témoignage sur la méditation offert par une amie pratiquante


Le rendez-vous matinal avec le coussin de méditation n'est pas systématique chez moi. J'en éprouve à chaque fois les bienfaits mais mon rythme de vie m'amène à me coucher assez souvent tard. Mon corps vieillissant a besoin de repos allongé et proteste au niveau des genoux et des hanches si je suis trop longtemps sur un coussin.

J'ai dû apprendre à comprendre la méditation autrement, ne pas la limiter à « je n'ai pas médité aujourd'hui » parce que je n'avais pas fait de méditation assise tout en évitant l'écueil d'une forme de complaisance dans une pratique dite « informelle ».
J'ai appris à accepter de mettre les mots de méditation en étant assise sur une chaise, en étant allongée, bref, en pratiquant ce que Thây nous enseigne dans son ouvrage Pratique de la méditation à chaque instant , ouvrage dans lequel la méditation assise n'occupe que quelques pages.

C'est tout un chemin de renoncer à l'attachement à une forme de méditation et d'être de plus en plus dans la conscience de la pratique dans les gestes de la vie quotidienne ; celle de s'arrêter et d'observer notre état physique et mental.
Être assis ne se résume pas à être sur un coussin, c'est aussi avoir l'esprit « assis ». Ce qui est vrai pour la méditation assise, l'est pour les autres formes de méditation et j'aimerais partager des expériences de méditation marchée.

Habituellement, en Sangha, lors des journées de Pleine Conscience, nous aimons, très légitimement, marcher dans un bel environnement, ressourçant, en contact avec la nature nourrissante.
Un jour, lors d'une journée de Pleine Conscience, nous étions dans un environnement très urbanisé. Nous n'avons pas fait le choix de prendre les voitures pour sortir de la ville pour pratiquer la marche méditative et à un moment, nous nous sommes retrouvés à traverser un parking d'hypermarché un samedi après-midi.
Marcher à un rythme normal, paisiblement, détendu, une expression de sourire sur le visage et...observer fut une expérience enrichissante.
Voir certaines personnes intriguées par notre attitude, ralentir un peu, se redresser en poussant le caddie, nous sourire parfois, nous a touchés.
Fort de cette expérience, un groupe de pratiquants de cette Sangha a souhaité recommencer cette pratique en plein centre d'une grande ville, un samedi après-midi. Nous avons beaucoup échangé sur comment cela pourrait se faire. En résumé, il nous fallait changer notre état mental, ne plus rechercher à avoir forcément un environnement porteur et ressourçant, mais nous mettre dans cette disposition d'esprit où nous avions quelque chose à partager, à offrir : notre paix, notre détente, notre sourire, et, nous « fondre » dans la foule.
Les participants ont résumé l'expérience sous les termes « c'était très fort, certaines personnes sont même venues vers nous pour nous demander un renseignement ». Néanmoins, nous éprouvons toujours la nécessité de marcher dans un environnement calme, naturel, nous permettant de nous ressourcer.
Nous reparlons parfois de cette expérience en disant qu'il faudrait recommencer...

Pour ma part, j'ai compris que je peux pratiquer la marche méditative dans beaucoup de circonstances, parfois pour recevoir et me ressourcer, parfois pour offrir, parfois simplement en étant présente, paisible et détendue là où la vie me fait poser mes pas.

Récemment équipée d'un outil qui, accessoirement sert de téléphone, j'ai téléchargé une application avec un joli son de cloche qui sonne tous les quarts d'heure. Il se promène avec moi en étant réglé sur le mode avion, et je suis comme une enfant espiègle qui expérimente son nouveau jeu. Ralentir au son de la cloche, observer que je « m'arrête » ou que je n'entends plus la cloche, l'entendre dans un magasin et me rendre compte de l'indifférence des autres clients…que d'enseignements !

Les Quatorze Versets de la Pratique de Méditation



Tout comme l’oiseau a deux ailes,

La méditation a samatha et vipasyana.

Telles les deux ailes qui battent à l’unisson,

Samatha et vipasyana vont ensemble.



Samatha consiste à s’arrêter,

Reconnaître, se mettre en contact,

Se nourrir, se guérir,

S’apaiser et se concentrer.



Vipasyana consiste à regarder profondément

Dans la nature des cinq skandhas

Afin de faire naître la vision profonde

Qui transforme toute souffrance.



La respiration et la marche attentive

Génèrent l’énergie de la Pleine Conscience

Qui nous permet de reconnaître les merveilles de la vie

Et de rester en contact avec elles.



Apportant détente et calme,

Cette énergie nourrit et guérit corps et esprit,

Protège les six organes des sens

Et maintient la concentration juste.



Le regard profond sur la réalité

Donne accès à la nature propre des choses,

Et aide à lâcher prise

De toute poursuite et de toute peur.



S’établir paisiblement dans le moment présent

Permet de transformer les énergies d’habitude,

De faire jaillir la vision profonde

Et de se libérer de toute affliction



L’impermanence est le non-soi.

Le non-soi est l’interdépendance.

Ils sont aussi vacuité, désignations conventionnelles,

Voie du milieu et inter-être.



La vacuité, la non-forme et la non-poursuite,

Appliquées dans la pratique quotidienne,

Libèrent de toute souffrance

Et font taire toute notion.



Le Nirvana est la non-obtention.

L’Eveil subit et l’Eveil graduel ne font qu’un.

Comprendre et réaliser cela,

C’est vivre librement dans l’instant présent.



Les soutras de base de la méditation

Comme le Soutra de la Pleine Conscience de la Respiration

Et le Soutra des Quatre Etablissements de la Pleine Conscience

Nous montrent la Voie

Aboutissant pas à pas à la transformation du corps et de l’esprit.



Les soutras et les sastras du Mahayana

Ouvrent de nouvelles portes

Et révèlent la profondeur

Du courant de la méditation originelle.



La méditation du Tathâgata et celle des patriarches

Ne devraient pas être séparées.

Les quatre nobles vérités doivent être vues les unes dans les autres

Pour être la fondation de la transmission.



Avec le soutien de la Sangha,

La pratique est plus facile à réussir,

Et le grand vœu d’aider tous les êtres

Plus vite réalisé sur la Voie.





Skandhas : agrégats – corps, sensation, perception, formation mentale et conscience.

Sastras : Enseignements du Bouddha qui sont systématisés et commentés par des patriarches.

Tathâgata : l’un des dix noms du Bouddha – celui qui ne vient de nulle part et qui ne va nulle part.


28 Janvier 2015 , Rédigé par Maison de l'Inspir